Le principe d'un tel ouvrage e´tait la possibilite´ d'apprendre sur la fac¸on dont un compositeur majeur de sa ge´ne´ration parvient a` transmettre ce qui pre´side au processus de sa cre´ation musicale. En particulier, l'application remarquable du compositeur a` dire, et non a` expliquer, « ce quelque chose d'avant la musique », cette « part confuse, celle ou` nous ignorons » que Pascal Dusapin de´signe aussi comme « l'innommable », et qui rencontre, au plus pre`s, l'objet de la psychanalyse. Sur le mode de la conversation libre, les entretiens se sont de´roule´s en plusieurs temps, au gre´ d'un d'abord autour de la question du flux, puis du temps, de la trace, de l'inconscient, et enfin de l'inquie´tude et du de´re`glement, devenus les titres qui organisent les diffe´rents chapitres de cette nouvelle e´dition. « Composer est un acte, un acte vivant » disait Pascal Dusapin lors de sa Lec¸on inaugurale au Colle`ge de France. L'audace du compositeur, la distance qu'il prend par rapport au savoir de´ja` institue´, celui de ses mai^tres, cette liberte´ inoui¨e qui pre´side a` sa musique s'entend dans chacun de ces entretiens. Le souci de maintenir une parole cre´ative, porteuse de nouveaute´ rencontre celui de la Jacques Lacan qui savait arracher la psychanalyse a` son repli dans le sommeil de l'orthodoxie.
Tenir l'accord est la nouvelle e´dition du livre d'entretiens re´alise´s par des psychanalystes, membres de l'E´cole de la Cause freudienne, avec le compositeur Pascal Dusapin en 2012, sous le titre Flux, trace, temps, inconscient.
Ont participe´ aux entretiens les psychanalystes, membres de l'E´cole de la Cause freudienne, Valentine Dechambre, François Ansermet, Jacqueline Dhe´ret, Paulo Siqueira, Nathalie Georges- Lambrichs, Serge Cottet, Hugo Freda, ainsi que le peintre Claude Luca-Georges.
Au fond, je ne parle jamais de musique. Je fais toujours un détour autour et alentour. Alors, j'invente des systèmes, sans jamais créer de corpus théorique ni même jamais m'inquiéter de la moindre cohérence entre eux. La question de la cohérence et même celle de la cohésion des systèmes est pour moi un sujet flou, et je greffe des petites machines à greffer d'autres greffes. Je dis toujours une chose pour une autre, parce que ce que je cherche, c'est ça : comprendre ce que je fais et quelquefois savoir n'y rien comprendre. Car je veux toucher ce qui traverse. Jamais je n'évite. Apprendre, ce n'est pas seulement acquérir une maîtrise. Apprendre, c'est devenir un autre. Un autre, libre et souverain. La difficulté fut de métamorphoser mon désir en une expérience.