Barthélémy Toguo (*1967) pose dans sa pratique artistique des questions d'une actualité brûlante sur l'identité et l'appartenance à la société en prenant pour thème la migration, la fuite, l'expulsion et toutes les restrictions issues des frontières territoriales et des politiques souverainistes. Avec en toile de fond sa double nationalité franco-camerounaise, il adopte une attitude explicitement anti-eurocentrique. Son attention se tourne vers les causes des rejets écologiques et leurs conséquences pour la société. Les mots-clés dans ce contexte sont notamment : pénurie d'eau potable et industrielle, dérapages de l'agriculture, effets du changement climatique, corruption, guerre, absence de perspectives de développement économique, etc. il associe l'humain et la nature dans ses travaux, qu'il s'agisse de peinture, dessin, sculpture, performances ou installation : « ce qui me guide, c'est une esthétique au développement ininterrompu, mais aussi un sens de l'éthique qui fait une différence et structure mon approche toute entière. » Le livre présente des oeuvres spécialement créées pour l'exposition d'Esslingen, des remakes et des installations adaptées - livre et exposition proposent également un bref aperçu rétrospectif de l'oeuvre de l'artiste.
"TJE ZU BA MYANMAR" est un album de photographies, en hommage aux femmes et aux hommes de la Birmanie.
Ce livre réalisé en grande partie en bichromie montre le peuple birman dans des images surprenantes.
Une photographie qui laisse découvrir ce pays lointain et son peuple chaleureux. Ce beau livre, réalisé sur un papier de haute qualité, nous fait redécouvrir les chemins de la mémoire et du coeur.
Un cadeau de fin d'année fort apprécié.
Les oeuvres de Diego Rodriguez de Silva y Velázquez, qui est probablement le plus grand peintre du XVIIe siècle, continuent de fasciner le public et les artistes du monde entier. Dans ce très bel ouvrage, Leah Kharibian nous fait découvrir cet artiste de génie et son entourage à travers d'aucuns de ses plus grands chefs-d'oeuvre. Elle y retrace son ascension de jeune apprenti à peintre de la cour de d'Espagne qui, au-delà de quelques splendides portraits, notamment de Philippe IV, nous a légué des toiles mythologiques tout aussi magistrales. Leah Kharibian est historienne de l'art et essayiste free-lance.
L'autoportrait est un genre d'art plastique purement européen et un genre extrêmement actuel : des portraits dans un miroir de la fin du Moyen-âge aux fières représentations de soi à l'époque baroque ou à l'image du moi sensible des romantiques, l'identité propre en image ouvre une série de thèmes qui va jusqu'au phénomène actuel du selfie partagé des millions de fois sur le réseau mondial. L'exposition et le catalogue ont été conçus dans le cadre d'une coopération internationale des musées de Karlsruhe, Lyon et Édimbourg. Un ensemble d'une centaine d'oeuvres de leurs collections (peintures, dessins, gravures et vidéos) est consacré aux motifs divers de la remise en question et de la présentation de soi par les hommes.
Dóra Maurer (*1937, vit à Budapest) passe pour l'une des Âreprésentantes les plus éminentes de la néo-avant-garde. En tant que telle, elle fait partie des artistes qui ont cheminé sur des voies progressives en-deçà de la politique culturelle Âétatique en Hongrie depuis les années 1960. Ses travaux, Âcomposés de graphismes, photographies, films, actionnisme et peinture, révèlent des approches conceptuelles claires dont les aspects centraux sont cependant la perception, le mouvement, le décalage et la transformation. L'abstraction, notamment celle des premières années de la République fédérale d'Allemagne, peut Âaujourd'hui être considérée comme un « assainissement » politique, alors qu'elle incarnait une « société ouverte ». Les collections des musées allemands sont nombreuses à s'orienter en conséquence, celles de la Kunsthalle de Bielefeld aussi. Mais dans les anciens pays de l'Est comme la Hongrie, l'abstraction avait une connotation « oppositionnelle ». Avec ses oeuvres non-figuratives, opposées aux consignes officielles du réalisme socialiste, Dóra Maurer occupe une position à part, encore étayée par ses contacts et voyages à l'Ouest, que sa double nationalité hongroise et autrichienne lui permet déjà avant 1989. Ses expérimentations avec la photographie et le film dans les années 1970, comme ses travaux abstraits géométriques basés sur le décalage processuel, affichent un parallélisme en apparence formel avec l'art de l'après-guerre en Europe occidentale et aux USA. Ils sont pourtant indéniablement liés à l'expérience de la vie sous un régime communiste sans Âlaquelle ils seraient inimaginables.
Nicole Eisenman (*1965) vit à New York, son Å«uvre frappe par la fascination pour la condition humaine qu'elle affiche, les questions de l'interaction interhumaine qu'elle pose et l'observation précise des processus de détachement civilisationnel dont elle témoigne. Dans ses peintures et sculptures, l'artiste associe des éléments de contextes culturels popà des références traditionnelles de l'histoire de l'art pour former une unité nouvelle. « Têtes, baisers, combats » rassemble des Å«uvres de toutes ses périodes de création. Sur le fond de cette pratique artistique qui met en évidence, outre les influences de la culture pop, divers éléments stylistiques et compositions repris à la peinture historique, l'exposition et l'ouvrage l'associent à des Å«uvres classiques modernes tirées des collections des musées participants et ouvrent ainsi une chambre de résonnance de plus d'un siècle où les bouleversements sociaux s'affichent dans leur urgence, mais aussi dans l'espoir et la confiance.
Rudolf Großmann (1882-1941) était un peintre et dessinateur réputé, tandis que sa plume acérée en faisait aussi un chroniqueur redouté. Il a reproduit dans ses portraits ou ses scènes de cafés et de rue les multiples facettes de la vie dans la grande ville, il a aussi publié textes et illustrations dans des revues comme Simplicissimus dans les années 1910 et 1920 et il a illustré des livres pour des auteurs comme Joachim Ringelnatz et Erich Kästner. Aujourd'hui pourtant, le nom de Rudolf Großmann n'est plus connu que des amateurs et spécialistes des années 1920. Avec en arrière-plan la question de pourquoi il est à ce point tombé dans l'oubli, l'exposition et le livre placent son oeuvre en rapport avec des travaux photographiques d'artistes contemporains. Ses peintures et dessins de la collection du Musée d'art moderne de Fribourg-en-Brisgau sont associés à des photographies de la collection de la fondation d'art DZ BANK. Ce sont surtout ses portraits dessinés, qui se distinguent par le caractère photographique du regard, qui s'avèrent intéressants face aux travaux de, par exemple, Wolfgang Tillmans, Sven Johne, Nan Goldin ou Gisèle Freund. Le regard aux perspectives multiples de Barbara Probst ou les constructions dans l'espace de Beate Gütschow témoignent de leur côté, dès lors qu'ils touchent aux scènes dessinées par Rudolf Großmann, d'une puissante similitude d'atmosphère malgré le siècle qui les sépare. ¬Rudolf Großmann se situait presque à égale distance des principaux styles de son époque, c'est ce qui rend son travail sans égal, tout en le rapprochant de la photographie. Cela n'a toutefois pas suffi à le protéger des poursuites des nazis, son art a lui aussi été stigmatisé et dénoncé comme dégénéré, l'incitant à se retirer de plus en plus dans sa ville natale de Fribourg-en-Brisgau.
Thomas Ruff (*1958) et James Welling (*1951) comptent parmi les artistes photographes les plus connus aujourd'hui. Leurs oeuvres explorent les conditions de la perception visuelle, et ce également en ce qui concerne l'emploi que nous faisons de l'appareillage photographique et la manière dont les photographies conditionnent notre vision du monde. L'exposition « Dunkle Materie/Dark Matter. Thomas Ruff & James Welling » (« Matière noire ») et le catalogue du même nom qui l'accompagne sont centrés sur des travaux qui arrachent véritablement de nouvelles possibilités à l'image photographique et élargissent notre capacité imaginative. Notre perception de notre environnement est subjective, nous le voyons et le ressentons sur le fond de ce que nous saisissons et comprenons des traditions visuelles et écrites. Près de quatre-vingt pour cent de la matière qui compose l'univers est fait de quelque chose que nous ne connaissons pas : la matière noire. En va-t-il de même avec la photographie ? L'image photographique cache-t-elle plus qu'elle ne montre ?
Arno Fischer (1927-2011) occupe une place importante dans la photographie allemande du 20ème siècle. Pendant toute sa carrière, il a oeuvré aux genres les plus divers : des photos de mode dans les rues de villes d'Europe orientale aux habitants des pays de l'Est et leur quotidien. Ses voyages l'ont mené notamment en Guinée-Équatoriale, en Inde, en Union soviétique et aux USA, toujours avec sa caméra. Et lorsqu'il ne parcourait pas les rues en filmant, il était un membre actif de DIREKT, un groupe de photographes fondé en 1965. À Berlin-Est qui a contribué pour une part essentielle à la diversification de la culture visuelle est-allemande dans les années 1970 et 1980. Arno Fischer a toujours entretenu, avec sa femme la photographe Sibylle Bergemann, ses contacts avec la scène photographique internationale. Robert Frank, Henri Cartier-Bresson ou René Burri ont toujours aimé leur faire des Âvisites-éclairs dans leur appartement du Schiffbauerdamm. Arno Fischer était aussi un enseignant passionné, il travaillait intensivement avec ses étudiants, d'abord à l'École supérieure des beaux-arts (Hochschule für Grafik und Buchkunst) de Leipzig, puis à l'école Ostkreuz de photographie de Berlin après la chute du Mur.
UMBO - le « big-bang » de la photographie moderne UMBO - ce nom incarne en quelque sorte un « big-bang » de la photographie moderne survenu au milieu des années 1920 : né Otto Maximilian Umbehr en 1902 à Düsseldorf, il est considéré comme l'inventeur de l'image de la femme nouvelle, de la nouvelle image de la rue, du reportage photographique par excellence. Son nom symbolise l'envol du mouvement de jeunesse des Wandervogel de la période wilhelminienne aux débuts du Bauhaus. Il est synonyme de la métropole médiatique en plein essor qu'était Berlin dans les années 1920, d'une scène artistique qui grandit à la vitesse de l'éclair entre cinéma, musique, théâtre et cabaret, de regards sur les arrière-cours et les cuisines des « cités-casernes » surpeuplées. La publication présente une sélection de 200 oeuvres et de nombreux autres documents, puisés pour l'essentiel dans la succession d'UMBO.
À la fois livre d'artistes et archive, cette publication introduit un sujet important et émouvant de l'histoire allemande. On y voit les types les plus divers de bunkers en hauteur, construits notamment entre 1940 et 1944, pendant la Seconde Guerre mondiale, et vus entre 1984 et 1989 par l'artiste et photographe Boris Becker. Lorsqu'il débute son projet documentaire, la Guerre froide est presque terminée et les constructions en béton sont peu à peu libérées de l'exigence de protection civile. Plus encore qu'avant, elles font l'effet de corps étrangers et de monstres inquiétants dans le paysage urbain. Leur fonction semble alors controversée et aucun esprit rationnel et sensé ne veut plus rien avoir à faire avec l'idéologie meurtrière dont ils évoquent le souvenir et qui les a fait sortir de terre. Boris Becker a photographié près de 700 bunkers dans plus de 40 villes d'Allemagne de l'Ouest. Ce recueil donne un aperçu exemplaire du sujet élaboré dans le cercle de l'école de Becher.
Au centre du travail photographique de Carina Brandes (*1982) - qu'elle a présenté en 2018 au Kunstverein de Heilbronn - se trouve son corps dont elle fait - sur un mode déjà presque « cool », selon une lecture aujourd'hui fréquente - la matière de sa production artistique. Cela donne lieu à des confrontations pour ainsi dire surréalistes entre son corps et les univers d'objets les plus divers qui transforment en mystérieuses circonstances pleines de désirs latents les décors en apparence quotidiens. Dans le contexte actuel de la politique autour du genre et du corps, celui des femmes est généralement assimilé à l'horreur et au sexe, associé aux victimes de maltraitances, ou encore dégradé au rang d'objet publicitaire suscitant l'excitation. Carina Brandes y oppose sa vision non explicite dans un monde délibérément privé d'hommes, déterminée par une objectivité abjecte autant que par des moments de sensualité pleins d'humour. L'artiste, que la gymnastique artistique pratiquée depuis sa plus tendre enfance a familiarisé avec son corps en tant que moyen d'auto-formation, travaille le plus souvent seule et continue de croire à la photographie analogique. Son approche ludique et dynamisante transcende l'interaction de la sensation et de l'excitation extérieure, du sujet et de l'objet, au-delà des problématiques féministes telles qu'elles sont formulées par Ana Mendieta, Maria Lassnig, Valie Export ou Cindy Sherman dans des prises de position déjà considérées comme classiques. Lauréate du prix Villa Romana en 2017, Carina Brandes a développé de nouveaux travaux à Florence qui ont été ajoutés à la présente publication, première revue d'envergure jamais réalisée de son oeuvre.
« Modèles / reproductions » - deux termes qui renvoient aux rapports entre les images, mais aussi à leur production sur la base d'images déjà existantes. Des photographies étaient notamment utilisées comme « références » ou « modèles » dans les académies d'art et écoles d'art appliqué du 19ème et du début du 20ème siècle où elles constituaient à elles seules un type didactique d'images. Les modèles photographiques étaient un outil important pour les artistes en herbe et leur pratique créative ; leur utilisation a donné naissance à des « reproductions » dans les cours d'art :
Peintures, sculptures, dessins et graphismes. Les archives de l'Université des arts de Berlin conservent une collection unique et précieuse de photographies utilisées à des fins pédagogiques qui remonte aux années 1850 et a été réunie par les institutions précédentes, l'Académie des arts de Berlin (Berliner Kunstakademie) et la grande école d'arts appliqués Kunstgewerbeschule. Avec près de 25 000 photographies isolées, auxquelles s'ajoutent des paquets et des albums, cette collection est unique en Allemagne.
Longtemps peu considérée, elle a pu être exploitée scientifiquement et archivée depuis quelques années. La collection est pré sentée pour la première fois dans ce livre et dans l'exposition préparée par le Stadtmuseum de Munich. Les motifs les plus courants des images qui la composent comptent des reproductions d'oeuvres d'art, des paysages, des études d'après nature d'eau, de nuages, d'arbres, de plantes, de rochers, etc., des architectures, des natures mortes aux fruits, au verre, etc., des portraits, des scènes de genre, des images du vivant, nus et études d'animaux, et des représentations orientales et historiques. Les études, connues en France sous le terme « études d'après nature », viennent de photographes européens et américains célèbres, parmi lesquels : Fratelli Alinari, Ottomar Anschütz, Karl Blossfeldt, Adolphe Braun, Eugène Cuvelier, Georg Maria Eckert, Constantin Famin, Wilhelm von Gloeden, Albert Renger Patzsch, Jakob August Lorent, Gustave le Gray, James Robertson, Henry Peach Robinson, Giorgio Sommer, Carleton Watkins.
Catalogue d'exposition Cat. Münchner Stadtmuseum. Collection photographique | Université des arts de Berlin, éd. Ulrich Pohlmann, Dietmar Schenk et Anastasia Dittmann, 450 ill. coul., textes (all./ang.) de Ludger Derenthal, Monika Faber, Antje Kalcher, Mei-Hau Kunzi, Hubert Locher, Kristina Lowis, Paul Mellenthin, Sabina Mlodzianowski, Angela Nikolai, Helena Perez Gallardo, Dorothea Peters, Herbert Rott, Bernd Stiegler, Herta Wolf et des éditeurs
Benjamin Katz, né en 1939 de parents juifs allemands à Anvers, doit sa célébrité à ses portraits pénétrants d'artistes, tels Georg Baselitz, Jörg Immendorff, Josef Beuys, James Lee Byars, Sigmar Polke ou Gerhard Richter. Pas une exposition de ces grands de la peinture allemande - auxquels Benjamin Katz est parfois lié depuis des années - qui ne se passe de ses portraits subtilement raffinés. Mais ses archives d'une carrière photographique de plus de 60 ans aux plus d'un demi-million de négatifs recèlent encore bien des surprises : notamment, outre des séries de photos conceptuelles, des observations du quotidien - paysages, traces du déclin industriel, détails architecturaux, trouvailles de poésie ordinaire ou encore moments d'absurde. Les clichés regorgent d'histoires non-dites, font appel à des associations hétéroclites, laissent en permanence transparaître l'esprit complexe de l'artiste. On ne peut que suivre avec admiration les résultats de cette création.
Rémy Zaugg (1943- 2005) était un artiste de portée internationale qui vivait et travaillait à Bâle et Mulhouse. Lui-même se voyait comme un peintre, mais il ne se contentait pas de produire des tableaux. Il générait à partir de sa pratique de la peinture des hypothèses générales pour une compréhension procédurale de l'oeuvre où il mettait en lumière d'un oeil neuf et inédit des contextes spatiaux, architecturaux et urbains. C'est pourquoi ses réflexions plaçaient toujours au centre l'homme qui perçoit en tant que membre de la société - ses hypothèses esthétiques débouchaient toutes sur l'idée émancipatrice du sujet « devenant ».
L'oeuvre de Sigmar Polke compte près de 200 éditions de 1963 à 2009 et la collection Ciesielski est la seule à les rassembler toutes dans le monde entier. Le livre consacré à l'exposition de la collection et sa confrontation avec des oeuvres de la collection Lambrecht-Schadeberg au musée d'art contemporain de Siegen veut avant tout permettre une observation intensive de quelques-unes des éditions pré - éminentes du 11e lauréat du prix Rubens de la ville de Siegen (2007) par une génération de rédacteurs plus jeunes, mais aussi par des connaisseurs intimes de son oeuvre et des compagnons de route.
Les auteurs osent le pari passionnant de formuler de nouvelles approches au travail du grand maître de l'équivoque et de l'ironie. Avec ses feuilles, chemises, livres, photographies et objets de l'art du 20e siècle, Sigmar Polke a ouvert des voies entièrement nouvelles autour de thèmes surprenants et de techniques expérimentales. Les éditions ont aussi puisé dans sa peinture pour, d'une part, nous y ramener mais aussi, d'autre part, développer des aspects médiatiques entièrement personnels.
La particularité des éditions de Sigmar Polke est sans doute que son principe de masquage de type camouflage s'y trouve totalement façonné, y compris en ce qui concerne le contenu. Il y a réalisé des photos de type reportage ou critiques de la société et les a placées sur le même plan et à côté de ses impressions en série colorées de motifs quotidiens, son mélange de style sur de simples éléments de décoration baptisé « German-Pop ». Sa position critique envers les médias et la culture apparaît dans ses Multiples, en particulier lorsqu'il travaille avec des gravures historiques ou des appareillages d'optique, voire simule des procédés magiques.
L'oeuvre de Peter Zimmermann revêt des formes multiples. À la fin des années 1980, les « Book Cover Paintings » ou peintures de couverture de livres y dominaient - l'artiste de Cologne a peint des titres d'atlas, de livres d'art, de guides de voyages et de dictionnaires à la résine époxy sur toile. Pour ses objets en carton, il a ensuite travaillé avec des distorsions spatiales de texte et d'image en prenant pour thème les boucles et leurs interactions. Ils ont été suivis de la série à succès de toiles aux couleurs éclatantes et aux formes peintes purement abstraites, pour lesquelles l'artiste commence par altérer des modèles numériques, des photos, des photographies de plateau ou des diagrammes à l'aide d'algorithmes graphiques, avant de les appliquer en multiples couches de résine époxy transparentes. Depuis 2014, fidèle à cette approche, Peter Zimmermann mise de nouveau plus sur la peinture à l'huile et crée des mers ondoyantes de tentacules grouillants baignées de couleurs vives. Enfin, pour le nouveau volume 2023 des livres d'artistes Kienbaum Artists' Books intitulé « Swipe », l'artiste a fouillé dans ses réserves et amassé ses sources et ses travaux en un incroyable pot-pourri. Les analogies qui se font jour révèlent un travail en profondeur sur le rapport entre original et copie et la notion de surface. Mais on a rarement vu un examen autodidacte des sources aussi hilarant.
Dans le cadre de la commémoration de la Réforme en 2017, les Deichtorhallen de Hambourg présentent une exposition de grande envergure de l'artiste média tique américain Bill Viola (*1951) avec 13 des installations vidéo qu'il a créées depuis 1992. Son travail tourne autour des thèmes centraux de l'existence humaine - naissance, émotion, spiritualité, amour et mort. L'artiste s'intéresse surtout aux traditions mystiques en général, du christianisme au bouddhisme zen et à l'islam. Cette ouverture spirituelle, où les corps des spectateurs deviennent toujours aussi le média d'ex périences marginales, se retrouve dans toutes les installations vidéo de Bill Viola qui séduisent par leur aura inoubliable. L'esthétique des images s'y appuie parfois fortement en ultra slow motion à l'iconographie du Moyen-Âge ou de la Renaissance -ces tableaux uniques en leur genre transmettent avec une puissance prodigieuse couplée à une exigence extrême de forme l'expérience du sublime et du spirituel avec les moyens que propose le langage des images du 21e siècle globalisé. Bill Viola compte, avec ses nombreux projets et ses multiples expositions - notamment au Grand Palais de Paris, au Museum of Modern Art de New York, à la 46e Biennale de Venise où il a représenté les USA ou en ce moment au Palazzo Strozzi de Florence -, parmi les plus éminents artistes contemporains au monde et passe pour le chef de file et principal représentant de l'art vidéo.
Sur huit tableaux indépendants d'une longueur totale de plus de soixante-dix mètres, Saul Steinberg a réalisé pour le pavillon américain de l'Exposition universelle de Bruxelles en 1958 un imposant collage sur l'American Way of Life, baptisé sobrement « Les Américains ». Le musée Ludwig de Cologne présente de nouveau pour la première fois l'ensemble complet, complété par d'autres dessins, collages et illustrations de magazines.
Saul Steinberg, né en 1914 en Roumanie et mort en 1999 à New York, a commencé en 1932 des études d'architecture à Milan, a fondé en 1936 l'hebdomadaire comique « Bertoldo » avant d'essayer en 1941 d'émigrer aux USA avec un passeport dont il avait falsifié lui-même le tampon pour être finalement refoulé en République dominicaine d'où il enverra des dessins au « New Yorker » afin de parvenir finalement quand même à gagner les USA. « The Americans » est considéré comme le sommet de son travail artistique qui lui a surtout valu la notoriété d'illustrateur du « New Yorker ».
Ce livre ne constitue pas seulement une documentation complète de « The Americans » avec de nouvelles illustrations excep tionnelles, il montre aussi pour la première fois et met parfaitement en valeur le mélange des médias les plus divers qui constituent l'oeuvre - dessin, photographie, motifs de papiers peints, papier d'emballage et fragments de bandes dessinées. L'exposition et le livre ne permettent donc pas uniquement de redécouvrir, mais ouvrent pour la première fois un regard authentique sur les possibilités de rencontrer l'Amérique des grandes villes et des campagnes telles qu'en offrait aussi la première exposition universelle dans l'Europe de l'après-guerre.
Le 17 août 1905, Carl van Overstraeten, 22 ans, quittait Anvers à destination de l'Etat indépendant du Congo. De son séjour africain qui n'aura pas duré deux ans, il ne nous a laissé qu'un journal manuscrit et quelques photos.
Son journal raconte son quotidien à bord du steamer Hainaut sur le fleuve Congo, lors d'un voyage long de deux mois et demi qui le mènera à son poste de travail, une factorerie de la Compagnie du Lomami à Yanga.
Un siècle plus tard, Nicole Ceulemans, sa petite fille, nous livre ce témoignage dans son texte intégral, enrichi de photographies d'époque inédites et de nombreux commentaires utiles pour la compréhension d'un contexte encore très peu documenté. Car au fil des pages, le lecteur découvrira en filigrane l'horreur et les désillusions du jeune colon, qui ne manquent pas de rappeler les récits du romancier Joseph Conrad. Un témoignage saisissant.