Georges Feydeau (1862-1921) s'est tôt imposé sur les scènes comiques en s'emparant d'un genre théâtral alors chéri du public et peu estimé des lettrés, le vaudeville. Il l'a perfectionné et lui a donné ses lettres de noblesse, au point d'en devenir le maître incontesté, dont les pièces n'ont cessé d'être jouées et applaudies. L'auteur de La Dame de chez Maxim, souvent remarqué pour son élégance et son apparente nonchalance, est en réalité un homme empli de paradoxes : le mondain qui hante les soirées parisiennes s'avère réservé et solitaire, tandis que derrière l'image de l'amuseur lève-tard et tout à ses collections d'objets d'art se cache un dramaturge inquiet, travailleur, exigeant et passionné. Pour exprimer ses contradictions et ses tourments, Feydeau choisit le rire, et poursuit sans relâche une double ambition : déclencher l'hilarité et susciter la réflexion.
«Le contagieux, c'est celui qui sait voir et les horreurs du monde et ses merveilles, qui ne peut pas supporter les horreurs et qui cherche des solutions pour qu'il y en ait moins. Il nous faut des contagieux.»Comment Henri Grouès (1912-2007), enfant introverti élevé dans le confort d'une famille bourgeoise aimante, devient-il l'abbé Pierre, fervent défenseur des plus vulnérables ayant choisi de se dépouiller de tout pour consacrer sa vie aux autres ?Nous connaissons tous cette icône populaire habituée des coups médiatiques, son «insurrection de la bonté» et son appel à la solidarité de chacun. Derrière cette figure emblématique se cache un homme d'action, parfois tempétueux mais toujours empli d'une humanité profonde, dont les agissements, grands et petits, découlent d'une seule et même ambition : réagir face à l'injustice et la précarité. Son parcours insuffle à ceux qui le découvrent l'envie de poursuivre son combat, toujours d'actualité.
«Non, meussieur Vili, non, Claudine ce n'est pas Unetelle, ni Mme Chose, ni Mlle Truc ou Machin-Chouette... Non, meussieur Vili, Claudine, c'est moi.» Colette (1873-1954) qui signa d'abord «Gabrielle Colette», puis «Colette Willy», puis «Colette Jouvenel», puis «Colette», qui aurait pu signer «Colette Goudeket» et ne le fit jamais, a été l'un des écrivains les plus célèbres et les plus admirés de son temps. Elle a séduit les publics les plus simples comme les plus raffinés. Auteur de nombreux romans et nouvelles, elle fut aussi mime, danseuse nue, actrice, journaliste, rédactrice de journaux à scandale, conférencière, esthéticienne. Sa vie privée, une fois débarrassée de ses légendes, de ses maris, de ses amants et de ses amantes, vaut bien un roman : celui d'une «écrivaine» éprise avant tout de liberté.
«Il n'y a pas de différence entre moi et les personnages que j'incarne, si ce n'est le travail à faire et le trajet à accomplir pour rejoindre chacun d'eux.» Gérard Philipe (1922-1959), figure majeure du théâtre et du cinéma des années 1950, connaît tôt des succès fulgurants sur scène. À l'écran, son incarnation de Fanfan la Tulipe en héros populaire français lui vaut une gloire internationale. Du Festival d'Avignon où il rejoint Jean Vilar au Théâtre national populaire, il transmet sa vision d'un théâtre accessible à tous. Son interprétation inoubliable des grands rôles du répertoire, le Cid, le prince de Hombourg, reste figée dans nos mémoires.L'acteur, adulé par le public, facétieux sur les tournages et en tournées internationales, défend les intérêts de ses pairs, conquis par sa générosité et son travail. Foudroyé à trente-six ans par un cancer, le Cid a désormais rejoint son mythe.
«À une époque de supercherie universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire.» George Orwell (1903-1950), de son vrai nom Eric Arthur Blair, est l'auteur d'une oeuvre très marquée par ses engagements politiques. Après avoir lutté contre l'Empire britannique en Birmanie, pour la justice sociale aux côtés des classes laborieuses de Londres et de Paris, puis participé à la guerre d'Espagne dans les rangs du P.O.U.M., il se consacre à une oeuvre littéraire écrite, «directement ou indirectement, contre le totalitarisme et pour le socialisme démocratique». Témoin lucide de son temps, auteur notamment de La Ferme des animaux et de 1984, il meurt à quarante-six ans, et demande dans son testament qu'aucune biographie ne retrace sa vie.
«Ceux qui comme moi ont eu le destin de ne pas aimer selon la norme finissent par surestimer la question de l'amour. Quelqu'un de normal peut se résigner - quel mot terrible - à la chasteté, aux occasions manquées:mais chez moi la difficulté d'aimer a rendu obsessionnel le besoin d'aimer:la fonction a hypertrophié l'organe, alors que, dans mon adolescence, l'amour me semblait être une chimère inaccessible.» La vie de Pier Paolo Pasolini (1922-1975), cinéaste, romancier, théoricien de l'art et de la littérature, se déroula à la fois comme un destin tragique et comme le symbole de la plus noble des libertés. Ce courage, il le paya très cher:scandales, procès, assassinat mystérieux enfin dont il fut la victime, sur une plage d'Ostie, une nuit de novembre.
«Je n'ai jamais considéré la peinture comme un art de simple agrément, de distraction. J'ai voulu par le dessin et par la couleur, puisque c'étaient là mes armes, pénétrer toujours plus avant dans la connaissance du monde et des hommes, afin que cette connaissance nous libère toujours davantage.» Cubiste, Picasso ? allons donc ! Surréaliste ? Encore moins. Communiste ? Pas vraiment. Sans doute fut-il à l'origine du cubisme, proche pendant quelque temps des surréalistes et détenteur d'une carte du Parti communiste, mais le plus grand peintre du XX? siècle est irréductible à toute étiquette. Complexe, multiple, en constante métamorphose, artiste polymorphe et amant dynamique, Pablo Picasso (1881-1973) n'eut, dans sa vie comme dans son oeuvre, d'autre loi que la sienne.
Comment faire entendre sa voix en ce XVIIIe siècle qui grouille de paroles alors que grandit le silence divin ? Quel langage trouver pour avoir le sentiment d'être soi ? Comment exister à ce moment où la politique devient un théâtre de l'idéal mais aussi de la cruauté ?
Comment, en somme, faire en sorte que « si la femme a le droit de montrer sur l'échafaud », elle puisse aussi avoir le droit de « monter à la tribune » ? Voici quelques-unes des questions auxquelles tentent de répondre cette biographie de Marie Gouze, dite Olympe de Gouges (1748-1793), auteur d'une oeuvre essentielle comprenant pièces de théâtre et écrits politiques dont la célèbre Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne.
«Pour moi ne comptent que ceux qui sont fous de quelque chose, fous de vivre, fous de parler, fous d'être sauvés, ceux qui veulent tout en même temps, ceux qui ne bâillent jamais, qui ne disent pas de banalités, mais brûlent, brûlent, brûlent comme un feu d'artifice.» À vingt ans, un soir de beuverie, Jack Kerouac (1922-1969) déclare à ses amis qu'il sera le «plus grand écrivain du monde». Il a le projet balzacien et proustien d'une oeuvre dont les séquences seront à ranger sous un label unique. Le sien se nommera Légende de Duluoz et scandera son parcours terrestre partagé entre solitude, désespoir, extase et jubilation, au travers de son Amérique tant aimée et d'une quête divine, car écrire était pour lui une prière adressée à Dieu.
« Je me suis trouvé un jour au théâtre, dans une salle, puis sur la scène : je m'en étonne encore moi-même. Cet étonnement ne me gêne pas, il me plaît et me satisfait. Le plus estimable, le plus heureux dans la vie est de s'étonner. » Louis Jouvet (1887-1951) se tourne vers le théâtre autour de ses vingt ans, jouant des mélodrames ou de petits rôles avant de rencontrer Jacques Copeau, qui en fait son plus proche collaborateur au Vieux-Colombier. Ensuite, à la Comédie des Champs-Élysées puis à l'Athénée, il montera Jules Romains, Marcel Achard, Jean Cocteau et surtout Jean Giraudoux, développant une remarquable science de la mise en scène, qu'il mettra aussi au service de Molière. Professeur au Conservatoire, il se passionnera pour l'enseignement et la réflexion sur son métier.
Enfin, au cinéma, il jouera dans une trentaine de films, dont plusieurs deviendront des classiques : Knock, La Kermesse héroïque, Drôle de drame, Hôtel du Nord, Entrée des artistes, Quai des Orfèvres.
C'est donc le récit d'une aventure artistique exceptionnelle que nous propose cette biographie.
«La Douleur est une des choses les plus importantes de ma vie.» Marguerite Duras (1914 -1996) a fasciné autant qu'elle a irrité. Auteur d'une oeuvre abondante qui s'exprima dans le roman, le théâtre, le cinéma, elle marqua de son empreinte la littérature mondiale du XX? siècle. De Moderato cantabile à L'Amant, en passant par Détruire dit-elle ou India Song, voire ses articles dans la presse, elle reste un écrivain profondément engagé dans son temps. De l'enfance rebelle en Indochine à l'isolement des dernières années dans sa maison de Neauphle-le-Château, ce livre retrace la vie de cet écrivain hors du commun qui n'hésitait pas à énoncer : «Si je l'ai écrit, c'est que ça a existé.»
« L'ensemble de mon oeuvre fera un jour un tout indivisible. Je fais [...] une Bible, non une Bible divine, mais une Bible humaine ». Poète, dramaturge, romancier, essayiste, pamphlétaire et artiste hors du commun, Victor Hugo (1802-1885) n'a suscité que des réactions passionnées. Son existence même fut placée sous le signe de l'exceptionnel, depuis sa naissance jusqu'à ses obsèques nationales suivies par plus d'un million de personnes. Protée au génie démesuré, partisan acharné du progrès de la vie sociale, de la liberté de la presse et de l'abolition de la peine de mort, il a exercé une influence considérable sur les idées littéraires, morales et politiques du XIXe siècle. Victor Hugo ? Un destin et une oeuvre. Entre les deux, un homme, dévoilé ici dans toute sa diversité, dans tout son souffle, par Sandrine Fillipetti : « Je finis par ne plus être qu'une espèce de témoin de Dieu ».
"Je porte en moi la mélancolie des races barbares, avec ses instincts de migrations et ses dégoûts innés de la vie, qui leur faisait quitter leur pays, pour se quitter eux-mêmes." Flaubert Peut-on lâcher son siècle ? Le détester, oui, lui préférer une Antiquité imaginaire, certes, mais Flaubert est entraîné dans les tourbillons du temps. Son oeuvre portera cette double marque : le rêve carthaginois d'un monde flamboyant à jamais disparu et la peinture vengeresse du siècle de Monsieur Prudhomme et du pharmacien Homais. Michel Winock porte un regard d'historien sur cette vie tout entière vouée à la littérature.
Son dégoût proclamé de la vie, Flaubert ne l'a transcendé ni par l'expérience amoureuse, ni par la foi en Dieu, ni par quelque idéal politique, mais par la religion de l'Art, dont il fut un pèlerin absolu.
«J'aime boire du champagne et devenir follement exaltée. J'aime partir en voiture vers Rodmell dans la chaleur d'un vendredi soir et manger du jambon, et être assise sur ma terrasse et fumer un cigare avec un hibou ou deux.» Virginia Woolf (1882-1941) fut une femme aux vies multiples : partagée entre Londres et sa retraite du Sussex, rompue aux mondanités comme à la solitude, attentive aux petits miracles quotidiens et bousculée par la folie.
Gertrude Stein, née le 3 février 1874 en Pennsylvanie, morte le 27 juillet 1946 à l'hôpital américain de Neuilly. Ces 2 dates, ces deux lieux, encadrent une vie passée de chaque côté de l'Atlantique, passée entre 2 siècles. D'où vient-elle ? La dernière d'une fratrie juive américaine dans une famille de commerçants aisés, d'origine allemande. Le passage d'un continent à l'autre est inscrit dans les gènes... et tout au long de sa vie, Gertrude ira de l'un à l'autre. Qui est-elle ? Tout d'abord, une insatiable curieuse qui aime s'instruire et se familiariser avec ce que la vie intellectuelle produit de nouveau : le « flux de conscience » qu'elle découvre à l'université auprès de son professeur William James, frère d'Henry, les travaux de Charcot sur l'hypnose et l'hystérie, les grands opéras de Wagner... Une admiratrice et un mentor, ce qui la conduira à être une collectionneuse fameuse, de Picasso tout au long de sa vie, mais aussi de Cézanne, de Renoir, de Picabia, de Juan Gris, de Matisse... tout ce qui a compté en peinture dans la première partie du XX e siècle s'est retrouvé sur les murs de Gertrude. Un écrivain, bien sûr, qui a trouvé de nouvelles formes, un rythme d'écriture singulier, des oeuvres souvent difficiles qui lui ont valu une reconnaissance tardive mais bien réelle, en Amérique où elle fait une tournée triomphale de conférences en 1935 et en France. Une amoureuse moderne, qui après avoir eu des difficultés à se définir comme homosexuelle, a ensuite pratiqué une forme de militantisme tranquille : elle a vécu une vie maritale avec Alice Toklas, rue de Fleurus à Paris comme dans le petit village de l'Ain où elles ont acheté une maison, sans rien cacher de leurs liens. Enfin, une européenne de coeur, elle qui a tant aimé Paris, bien sûr, la province française qu'elle a traversée au volant de ses différentes voitures (des Ford, exclusivement) qu'elle a aimé baptiser (Tatie, Govida...) et dans lesquelles un bagage signé Hermès accueillait les chiens qui ont les ont accompagnées, notamment le caniche Basket et le chihuahua Pépé... Elle a autant aimé l'Angleterre, l'Italie et l'Espagne, le pays de Pablo dont elle dit : « Il est naturel qu'un Espagnol ait exprimé en peinture l'âme du XX e siècle où rien ne s'accorde, ni la sphère avec le cube, ni le paysage avec les maisons, ni la grande quantité avec la petite. L'Amérique et l'Espagne ont cela en commun, c'est pourquoi l'Espagne a découvert l'Amérique et l'Amérique l'Espagne. » On pourra regretter, et le travail de Philippe Blanchon ne le passe pas sous silence, son manque de sens politique qui lui a fait notamment rapprocher Hitler et Roosevelt...
«Dans la vie, l'essentiel est de porter sur tout des jugements a priori. Il apparaît en effet que les masses ont tort, et les individus toujours raison. Il faut se garder d'en déduire des règles de conduite ; elles ne doivent pas avoir besoin d'être formulées pour qu'on les suive. Il y a seulement deux choses : c'est l'amour, de toutes les façons, avec des jolies filles, et la musique de La Nouvelle-Orléans ou de Duke Ellington.» Ingénieur, trompettiste de jazz, acteur, chanteur, parolier, pasticheur de romans noirs américains, critique, auteur de nouvelles et de pièces de théâtre, Boris Vian (1920-1959) ne fut jamais reconnu de son vivant pour ce qu'il était avant tout : un grand romancier au style exubérant, mêlant l'absurde à l'émotion, le paradoxe à la fantaisie. Auteur blessé de L'Écume des jours, il meurt à trente-neuf ans, le 23 juin 1959.
« Une si dévorante soif de voir, de connaître, d'apprendre.» Les soeurs Brontë... Ce pluriel, depuis un siècle et demi, fascine. Quand Emily écrit Les Hauts de Hurlevents, Anne publie La Recluse de Wildfell Hall, et Charlotte Jane Eyre. La première meurt à trente ans, en 1848 ;
La seconde à vingt-neuf, un an plus tard ; la troisième à trente-neuf, en 1855. Sans oublier Branwell, le frère écrivain maudit, qui disparaît lui aussi prématurément, miné par l'alcool et la tuberculose. Tous quatre étaient orphelins de mère. Quelle probabilité il y avait-il pour que tous ces talents aussi originaux poussent ainsi à l'ombre du presbytère de Haworth? Faute de pouvoir éclaircir totalement ce mystère, Jean- Pierre Ohl tente d'en dessiner les contours, et de comprendre ce qui, aujourd'hui encore, rend si proche de nous les enfants du pasteur Patrick Brontë.
«Je suis l'enfant de mon siècle; j'ai subi ses maux, j'ai partagé ses erreurs, j'ai bu à toutes ses sources de vie et de mort.» Amandine-Aurore-Lucile Dupin (1804-1876), devenue George Sand en 1832, avec la publication d'Indiana, fut, dès l'enfance imprégnée des traditions et des légendes de son Berry natal. Observatrice attentive de son temps, elle fume la pipe, s'habille en homme, affiche ses convictions républicaines, est l'amante enflammée de Musset et de Chopin, en un mot fait scandale. Son oeuvre, de Consuelo à La Mare au diable, en passant par La Petite Fadette, culmine dans Histoire de ma vie, et fonde un genre littéraire:l'autobiographie au féminin. Amoureuse éperdue de la vie, George Sand écrit en 1831 à Sainte-Beuve:«Vivre! Que c'est bon! malgré les chagrins, les maris, l'ennui, les dettes, les parents, les cancans, malgré les poignantes douleurs.»
"Ne crie pas que tu donneras ta vie pour tes principes, pour la vérité ; mais tâche de ne jamais mentir". L'histoire retient d'Alexandra David-Néel (1868-1969) qu'elle est la première européenne à séjourner à Lhassa au Tibet. Jennifer Lesieur rappelle qu'elle fut aussi chanteuse d'opéra, franc-maçonne, journaliste, et qu'elle écrivit une quarantaine de livres dont Voyage d'une parisienne à Lhassa et La Lampe de sagesse.
Orientaliste érudite, elle vécut toute sa vie dans la lumière du bouddhisme parce que, disait-elle "il est basé sur la possibilité de se libérer par soi-même de la souffrance". Du Sikkim à Kalimpong, de Lachen au Tibet, en passant par le Japon, la Corée, la Chine, la Mongolie nous suivons pas à pas cette exploratrice audacieuse, féministe convaincue, jusqu'à Digne, petite ville de Haute-Provence, où elle s'éteint à presque 101 ans, dans la "douceur sereine d'une inébranlable paix".
"J'affirme que le monde des sens est à l'origine de toute compréhension humaine." Marin, chasseur de phoques, boxeur, chauffeur, repasseur, mineur, correspondant de guerre, vagabond du rail, chômeur, clochard, Jack London (1876-1916) vécut dans sa courte existence plus de mille vies. Sa bibliographie, qui compte une cinquantaine de volumes, comprend des nouvelles, des romans, des pièces de théâtre, des articles, des reportages, des discours enflammés au nom du socialisme. L'Appel de la forêt, Croc-Blanc, Construire un feu, Martin Eden, Le Talon de fer, autant de titres qui composent une oeuvre dans laquelle l'autobiographie et le combat pour la vie occupent une place primordiale. À l'aube de sa quarante et unième année, consumé par tous les excès, il décide de mettre fin à ses jours en s'administrant une dose mortelle de morphine.
« [...] l'âme humaine n'a pas encore montré tout ce qu'elle peut être ; toutes ses façons possibles de penser et de sentir ne sont pas épuisées. » Marivaux (1688-1763), auteur prolifique aux multiples facettes, occupe une place singulière dans l'histoire littéraire française. Très grand auteur de théâtre (mais aussi romancier et journaliste), il a réinventé la comédie avec des pièces qui, plus de trois siècles plus tard, nous séduisent encore par leur modernité. L'Île des esclaves et Le Jeu de l'amour et du hasard, composées pour la Comédie-Italienne, font partie des chefs-d'oeuvre qu'il nous a légués. Ses personnages, inoubliables, sont entrés dans l'imaginaire collectif. Surtout, personne n'a su analyser les rouages du sentiment amoureux mieux que lui. Mais malgré ses succès, Marivaux fut beaucoup moqué par ses pairs en raison de son style inhabituel, manquant de naturel - le fameux marivaudage. Cela ne l'empêcha pas d'être élu à l'Académie française... contre Voltaire !
Romancière, essayiste, psychanalyste, Lou Andreas-Salomé (1861-1937) est avant tout un esprit libre. À vingt ans, elle fait le pari d'une amitié philosophique avec Nietzsche, et joue avec le feu de son amour. À trente, compagne de Rilke, elle le guide sur la voie de la création, et se dérobe à sa passion. À quarante, elle est accueillie par Freud comme sa disciple la plus intelligente, et lui fait accepter ses hérésies. Femme parmi les hommes, elle a rêvé d'un « monde de frères », de mariage sans sexualité, de maternité sans procréation, d'inconscient sans pulsion de mort. Philosophie, poésie et psychanalyse ont été les instruments d'une seule grande affirmation : le lien indissoluble entre l'individu et la vie tout entière. Lou Andreas-Salomé n'aura eu qu'une obsession - qui est aussi le titre d'une de ses nouvelles : « le Retour au Tout ».
«Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu'avec le coeur. L'essentiel est invisible pour les yeux.» Après son échec à la Navale, Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) envisage une carrière d'architecte. Inscrit aux Beaux-arts, il abandonne après quelques mois. Écrivain presque par accident, il consacre toutes ses forces à un ouvrage qui ne prend jamais forme et s'abîme en mer, un 31 juillet 1944, aux commandes de son Lightning P38. Dans cette biographie, Virgil Tanase nous dresse de l'auteur du Petit Prince et de Vol de nuit un portrait dégagé de sa légende. Celui que sa mère appelait «le Roi-Soleil», au fil des jours, en essayant simplement, comme il le dit «de faire au mieux», a construit une oeuvre et s'est forgé un destin. Celui d'un homme persuadé que la vie ne vaut que par le sacrifice qu'on en fait au nom d'un devoir d'absolu.
« Cultiver les plaisirs de mes sens fut, dans toute ma vie, ma principale affaire ; je n'en ai jamais eu de plus importante ». Il n'a pas fallu longtemps, un siècle tout au plus, pour que GiacomoCasanova (1725-1798) prenne sa place au Panthéon des mythes. Fils d'une modeste famille de comédiens, il est devenu, à la faveur de ses Mémoires, Histoire de ma vie, une figure de référence dans l'art de la séduction. Mais qu'était-il vraiment ? Un agent secret, un aventurier cosmopolite, escroc à ses heures ? Pour aborder Casanova, il faut se garder d'appliquer à son histoire les catégories issues des deux siècles qui nous séparent de lui. Le dépouillant de ses attributs de surmâle, Maxime Rovere en fait un éternel amoureux joueur de cartes invétéré, mais aussi un voyageur insatiable, un homme de lettres éperdu de projets, un grand amateur de vins et un incomparable gastronome, en somme le chantre d'une liberté nouvelle, praticien volontaire d'unephilosophie joyeuse et hédoniste.