J'ai vécu ce que j'avais à vivre et aimé du mieux que j'ai pu. Si je n'ai pas eu de chance ou si je l'ai ratée d'un cheveu, si j'ai fauté quelque part sans faire exprès, si j'ai perdu toutes mes batailles, mes défaites ont du mérite - elles sont la preuve que je me suis battu. Algérie, 1914. Yacine Chéraga n'avait jamais quitté son douar lorsqu'il est envoyé en France se battre contre les «Boches». De retour au pays après la guerre, d'autres aventures incroyables l'attendent. Traqué, malmené par le sort, il n'aura, pour faire face à l'adversité, que la pureté de son amour et son indéfectible humanité. Les Vertueux est un roman majeur, la plus impressionnante des oeuvres de Yasmina Khadra.
Azincourt, un joli nom de village, le vague souvenir d'une bataille perdue. Ce 25 octobre 1415, il pleut dru sur l'Artois. Quelques milliers de soldats anglais qui ne songent qu'à rentrer chez eux se retrouvent pris au piège par des Français en surnombre. Bottés, casqués, cuirassés, armés jusqu'aux dents, brandissant fièrement leurs étendards, tous les aristocrates de la cour de France se précipitent pour participer à la curée. Ils ont bien l'intention de se couvrir de gloire, dans la grande tradition de la chevalerie française. Aucun n'en reviendra vivant. Toutes les armées du monde ont, un jour ou l'autre, pris la pâtée, mais pour un désastre de cette ampleur, un seul mot s'impose:grandiose!Avec la verve qu'on lui connaît et son sens du détail qui tue, Jean Teulé nous raconte ces trois jours dantesques où, sous une pluie battante, des milliers d'hommes se sont massacrés dans un affrontement sanglant d'autant plus désastreux que cette bataille était parfaitement inutile.
Journaliste, Adèle Codreanu ne s'est jamais intéressée aux pays que ses parents ont fuis avant sa naissance. Au hasard d'un reportage à Bucarest, elle découvre que les Roumains ont exterminé 400000 Juifs pendant la guerre. Pourquoi ses parents n'ont-ils jamais rien dit ? Elle veut savoir. Éblouie par la lecture des livres d'Appelfeld et de Hilsenrath, elle se lance sur leurs traces. Village après village, camp après camp, elle va découvrir pas à pas le martyre qu'ont enduré des dizaines de milliers de familles. Partout, malgré les indices qui subsistent, les témoignages qu'elle rassemble, elle se heurte à l'incrédulité des Roumains. Pour eux, cet holocauste n'a jamais existé. Et pourtant si ! Le pire a été commis. Et probablement par des membres de sa propre famille. Pourquoi tout le monde s'obstine à le nier ? C'est impossible. C'est inacceptable. Elle va l'écrire. Elle va le crier.
À l'âge où il est d'usage d'envisager un repos bien mérité, Lionel Duroy a choisi d'enfourcher son vélo et de s'en aller vers ces endroits qui l'ont toujours fasciné:la Roumanie, la Moldavie, la Transnistrie... et peut-être Stalingrad. Il avait l'idée de rouler sans autre projet que de jouir du plaisir d'exister, jusqu'à s'épuiser, pour finalement passer seul et sans cérémonie de l'autre côté. Disparaître. Il l'a tenté, mais la vie est un roman qu'il a fini par écrire.
Tout va bien pour Souheila. Ou, plus exactement, rien ne va mal. Alors, qu'est-ce qui la pousse à entrer dans ce salon de massage thaïlandais à deux pas de chez elle qu'elle n'avait jamais remarqué ? Et pourquoi n'en parle-t-elle pas à Rémi, l'homme avec qui elle partage sa vie ? C'est la question à laquelle elle va devoir répondre quand un scandale éclate, qui met au coeur de l'attention le salon de massage et ses clientes. Souheila, plus à l'aise dans l'ombre et les interstices, se voit contrainte de se rapprocher de ces femmes avec lesquelles elle ne partage rien, si ce n'est d'avoir été victime des mêmes trafiquants. Mais être victime est-il suffisant pour créer des liens ? C'est pourtant par le biais de ce petit groupe que Souheila rencontre un homme qui va bouleverser le cours de son existence, l'obligeant à faire des choix, elle qui s'en remettait au hasard. Avec une plume saillante et un humour mordant, Mazarine Pingeot s'attaque ici aux sujets les plus brûlants de notre époque.
Après Rimbaud, Verlaine et Villon, Jean Teulé se devait de se pencher sur la vie et l'oeuvre de Charles Baudelaire. L'oeuvre éblouit, le personnage fascine. Cet homme au caractère épouvantable, qui ne respectait rien, qui méprisait les usages et les êtres humains en général, n'a eu d'autre ambition que de saisir cette beauté qui lui ravageait la tête et de la transmettre grâce à la poésie. Il a réuni à travers cent poèmes l'ignoble et le sublime et les a jetés à la face de l'humanité. Cent fleurs du mal qui ont changé à jamais le destin de la poésie française.
Jean Teulé s'est nourri de cette matière pour atteindre ce lieu mystérieux où, telle la lave des volcans, surgit la création.
Le 26 mai 1964, un enfant parisien sort de chez lui en courant. On retrouvera son corps le lendemain matin dans un bois de banlieue. Il s'appelait Luc. Il avait onze ans. L'affaire fait grand bruit car un corbeau qui se dit l'assassin et se fait appeler « l'Étrangleur » inonde les médias, les institutions et les parents de la victime de lettres odieuses où il donne des détails troublants sur la mort de l'enfant. Le 4 juillet, il est arrêté. C'est un jeune infirmier, Lucien Léger. Il avoue puis se rétracte un an plus tard. En 1966, il est condamné à la prison à perpétuité. Il restera incarcéré quarante et un ans, sans jamais cesser de clamer son innocence.
Avec son style inimitable, Philippe Jaenada reprend minutieusement les éléments du dossier et révèle que, par intérêt, lâcheté, indifférence ou bêtise, tout le monde a failli, ou menti. Alors il se penche sur Solange, la femme de l'Étrangleur, seule et vibrante lumière dans la noirceur.
À travers ce fait divers extraordinaire, il fait le portrait de la société française des années 60, ravagée par la deuxième guerre mondiale mais renaissante et, légère seulement en apparence, printemps trompeur de celle qui deviendra la nôtre.
À l'Enclos de la Trinité, un trou perdu dans l'État mexicain de Chihuahua, Elena et Diego s'aiment depuis l'enfance. On les appelle les «fiancés». Un jour, Elena est sauvagement agressée sous les yeux de Diego, tétanisé. Le rêve se brise comme un miroir. Elena s'enfuit à Ciudad Juarez, la ville la plus dangereuse au monde. Diego doit se perdre dans l'enfer des cartels pour tenter de sauver l'amour de sa vie.Pour l'amour d'Elena s'inspire librement d'une histoire vraie.
Je tourne la page, et ça y est, la chose est enfin dite : «Dans un entretien, observe Nathalie Léger, Marguerite Duras s'énerve un peu : L'autoportrait, je ne comprends pas ce que ça veut dire. Non, je ne comprends pas. Comment voulez-vous que je me décrive ? Qui êtes vous, allez-y, répondez-moi, hein ?» Qui je suis, moi ? C'est la question à laquelle je dois maintenant répondre.Lionel Duroy aura passé l'essentiel de son temps à écrire. À travers ses nombreux romans, il a tenté de démêler les fils d'une vie, éclairant au passage celles et ceux qui nous aident à grandir ou s'emploient à nous détruire, parfois sans le vouloir : nos parents, nos frères et soeurs, ceux que nous aimons, puis désaimons. Aujourd'hui, avec L'homme qui tremble, il inverse les perspectives et, dans un autoportrait cruel et lumineux, s'interroge sur son propre rôle dans ce destin singulier.
Son premier roman a été un tel naufrage que Benoît peine à y croire lorsqu'on lui annonce que Yanis Saint-Saëns, réalisateur multiprimé, compte porter son livre à l'écran et lui confier le premier rôle. Est-ce un canular¿ ? Un guet-apens ? Mais le jeune écrivain tombe immédiatement sous le charme du cinéaste, un homme brillant, cruel et fantasque. Benoît se laissera happer par tous les mirages, acceptera un scénario dénaturant totalement son histoire et suivra Yanis dans l'enfer d'un tournage cauchemardesque. Ébloui, essoré, il traversera le cataclysme en funambule, au risque de perdre définitivement contact avec la réalité et de disparaître dans la ronde des simulacres.
Sur un même dossier où n'apparaissent ni preuve ni aveu, un homme de soixante-six ans, après avoir été acquitté en première instance, vient d'être condamné en appel à quinze ans de prison et, du même coup, rayé du monde des vivants. Que l'on «croie» cet homme innocent ou non n'a aucun intérêt:une justice sérieuse et digne, honnête, n'avait simplement pas le droit de l'empêcher de poursuivre librement sa vie, sans raison valable, en faisant mine de s'appuyer sur un dossier qui ne contient que du vide trouble, des inepties, des tricheries.À travers cet exemple, dont il décortique avec la minutie qu'on lui connaît chacun des éléments, Philippe Jaenada dresse un vibrant réquisitoire contre les dysfonctionnements inacceptables d'un système policier et judiciaire qui, par manque de moyens et de détermination, se délite sous nos yeux dans l'indifférence générale.Après les succès remarqués de La Petite Femelle, de La Serpe (prix Femina) et d'Au printemps des monstres, Philippe Jaenada nous offre ici une nouvelle facette de son très grand talent.
La nuit dernière, j'ai rêvé encore de Dona Gracia.Sur elle j'avais lu beaucoup de livres qui me la montraient tout en me la cachant. Soudain elle m'apparaissait telle qu'en elle-même, vivante et traversant le temps, de la Renaissance au XXI? siècle. Je savais qu'elle était une construction, un double qui se multipliait à travers l'écriture de l'autrefois. Mais je savais aussi que j'avais besoin d'elle aujourd'hui. Qu'elle m'offrait ce modèle de vie que j'avais recherché dans d'autres femmes de l'Histoire et de mon histoire. Qu'elle me tendait ses fils pour débrouiller l'écheveau.Née nouvelle-chrétienne en 1510 et morte juive en 1569, dona Gracia voua son immense fortune à soudoyer les grands pour fuir l'Inquisition, tout en venant en aide aux juifs convertis persécutés dans l'Europe catholique de Charles Quint. De Lisbonne à Anvers, Venise et Ferrare, elle accomplit un invraisemblable périple pour finir à Constantinople, où le sultan Soliman le Magnifique l'accueillit, elle et les siens. De la Corne d'or, elle décréta l'embargo sur Ancône, port des États pontificaux, et construisit un havre pour les opprimés à Tibériade. Pour la première fois, les juifs et les marranes se dressaient face à la haine, sous la bannière d'une femme.
Imaginez que vous soyez responsable d'un crime dont vous n'avez aucun souvenir. C'est précisément la situation dans laquelle Émile s'est retrouvé. Quand il s'est réveillé, une femme était morte à ses pieds, assassinée. Une heure oubliée où le pire est arrivé.En sortant de prison des années plus tard, Émile pensait pouvoir tout effacer de cet interminable cauchemar. Il est redevenu un homme ordinaire, amoureux d'une femme ignorant tout de son passé. Mais c'était sans compter sur cette journaliste qui allait de nouveau bouleverser son existence en révélant son secret à la face du monde.Avec une maîtrise étonnante, Frédéric Perrot nous entraîne dans un récit haletant entre passé, présent et futur, en quête d'une vérité aux mille facettes.
Laura, passionnée de littérature japonaise, travaille pour la petite entreprise de peinture de son mari. A sa surprise, elle est sollicitée en urgence pour dépanner la médiathèque de sa ville et dialoguer publiquement avec l'un de ses écrivains favoris. Sa prestation est si étonnante que le romancier en parle sur les ondes d'une grande radio. Cette sortie soudaine de l'anonymat produit chez la jeune femme une étrange réaction.
Elle grandit, grandit, grandit... A cette fable menée tambour battant, Murielle Magellan mêle des extraits de son journal qui, peu à peu, mettent en perspective la remarquable évolution de la place des femmes dans la société d'aujourd'hui. A bas bruit, Géantes est aussi un vibrant hommage à la littérature et à la lecture.
«La laïcité suscite d'intenses controverses», rappelle l'historien et sociologue Jean Baubérot au seuil de cette correspondance musclée avec la sociologue Nathalie Heinich. Leurs échanges le confirment. Au nom de quelle laïcité parlons-nous ? Quelle laïcité voulons-nous ?Si Jean Baubérot prône une laïcité d'inclusion, Nathalie Heinich refuse les compromis qui ne seraient que renoncements aux valeurs républicaines dès lors que pointe, à ses yeux, l'offensive religieuse.Derrière la laïcité, c'est la question de la République qui se pose, mais également celle de la frontière entre sciences sociales et engagement militant que réaffirment les deux auteurs chacun à leur manière.
Réunis au Café de l'Univers, quelques amis de longue date conviennent de raconter chacun à tour de rôle une histoire remarquable puis d'en tirer une morale, une leçon - ou même plusieurs.Dans son style vigoureux et drolatique où l'ironie le dispute à la compassion, Fouad Laroui nous offre ici un florilège surprenant et vivifiant qui remet en perspective beaucoup de certitudes qui structurent les étranges sociétés où nous sommes condamnés à vivre.
Il adorait ses parents. Joyeux, déjantés, imprévisibles, la vie à leurs côtés était un tourbillon de fantaisies. Jusqu'à cette nuit où ils ont couru vers la mer pour un bain de minuit, oubliant la falaise. Le chagrin causé par leur mort est immense. Désormais, son quotidien routinier lui semble dérisoire. Il décide de changer radicalement d'existence.Abandonnant ses certitudes, il s'installe à la Plateforme : un treizième étage entièrement vide où il a évolué pendant son enfance. L'endroit idéal pour laisser libre cours à son imagination et se réapproprier chaque journée, chaque heure, sans tenir compte des règles sociales. Tenter de faire son deuil grâce à deux antidotes inattendus : la fantaisie et la joie.
La question animale attise les passions, mais, au fond, pourquoi? Si Corine Pelluchon estime que la mise à mort d'un animal élevé pour sa chair est moralement problé-matique, Jocelyne Porcher, qui fut éleveuse, considère que c'est par le prisme du travail qu'il faut interroger la place de la mort dans nos relations avec les animaux.Cette question abyssale - a-t-on le droit de tuer des animaux? - est au coeur de l'argumentation des deux auteures qui font part de leur expérience, en partageant leurs certitudes comme leurs doutes.
Lucie a peur. De tout. Si le métro s'arrête entre deux stations, elle pense qu'elle va mourir. Elle craint, lorsqu'elle part travailler le matin, qu'une catastrophe ne survienne, la privant à jamais de revoir son mari et ses enfants. Pourtant, à quarante ans, elle est comblée par un métier qui la passionne et une vie de famille réussie. Mais la disparition brutale d'Héloïse, sa cousine sourde et muette qu'elle chérissait, et celle de Louis, son ami d'enfance, font affleurer un souvenir flou et pénible au goût d'essence et de boue.Pour se libérer de ce mal étrange, Lucie devra revenir à la source de l'angoisse qui la saisit et l'empêche de vivre. Parce que, oui, la peur est tapie dans l'enfance, enfermée dans la cabane du pêcheur.Dans ce roman envoûtant et d'une grande justesse, Mazarine Pingeot revient sur la fragilité des vies construites sur des marécages. Et la peur continue est un cri dans ce silence assourdissant.
La vie est ironique. À quoi sert de gagner au loto quand on vous apprend que vous êtes atteinte d'une leucémie ? Née dans une petite ville industrielle que la crise a dévastée mais qu'une bande de citadins chics s'est mis en tête de coloniser, Mado voit son univers s'effondrer. Une greffe osseuse peut la sauver. Sauf que le seul donneur compatible est son frère aîné, Léon, à qui elle ne parle plus depuis longtemps. Avec intelligence, courage et détermination, Mado démontre magnifiquement que la vie est un combat que certains savent ne pas perdre.
Les divorce hotels promettent de divorcer en un week-end, sans tracas ni démarches interminables, dans un souci de médiation, de bonne humeur, et même de bien-être. L'Hôtel du bord des larmes est l'un de ces hôtels. En ce vendredi de début d'été, il accueille Cécile et François, désolés d'en arriver là, pas très convaincus par l'idée, mais bien décidés à rompre ce mariage tout en préservant leur fille : ce que l'amour a fait mourir, la famille qu'ils étaient les oblige à le laisser en vie. Au cours de ces deux jours, ils vont revivre les émotions qui les ont unis puis séparés, accepter de prendre leurs distances... et faire de nouvelles rencontres. Et ça, ce n'était pas prévu.À travers les aventures touchantes et drôles de ses jeunes personnages, Elsa Flageul dessine un portrait acide et très subtil de la difficulté à vivre des nouvelles générations.
Je ne crois pas avoir appris quoi que ce soit qui ne comportât pas la promesse du sourire.En vous invitant à une promenade dans ce recueil d'extraits de textes de Jacques A. Bertrand, choisis au gré de notre admiration et de l'amitié qui nous a liés, nous espérons vous offrir le meilleur de cet écrivain rare.
Vous ne me lirez peut-être pas jusqu'au bout. Peut-être vous arrêterez-vous au milieu, ou même avant.Mais j'existerai toujours, je serai toujours là, couchée sur le papier.Je serai toujours quelque chose qui n'était pas là avant.Je ne suis pas de ces histoires qui savent parfaitement où elles vont, ni par quel chemin s'y rendre. Mais je les suivrai eux. L'homme et son formulaire, la femme aux petites mains moites ou le garçon aux longues jambes et sa triste clique.Je les suivrai eux, je trottinerai derrière, juste assez longtemps pour que vous les aimiez, et ils me mèneront là où je dois aller.
Loin du milieu littéraire et en mal de contrat, François Korlowski accepte de participer à la rédaction d'un ouvrage collectif ayant pour but de célébrer les Grands Prix du roman de l'Académie française. Son travail:écrire une notice sur Alphonse de Châteaubriant, homme de lettres de sa région, Grand Prix 1921.Galvanisé par cette proposition de la Coupole, l'auteur rêve à une reconnaissance nationale.Ironique et tendre, Jean-François Kierzkowski nous entraîne dans les aventures fantasques de son héros qui, semblable aux personnages de Buster Keaton, provoque en toute innocence les plus surprenantes et jubilatoires catastrophes.