L'ouvrage explore le monde de l'estampe contemporaine en s'intéressant en particulier aux productions les plus spectaculaires et les plus hétérodoxes. Cinq cents ans après Albrecht Dürer, dont le monumental Arc de triomphe de Maximilien I assemblait pas moins de 36 feuilles imprimées, les artistes plébiscitent plus que jamais le grand format, l'estampe n'étant plus depuis longtemps un instrument de diffusion de l'image mais bien un champ d'expérimentation et un moyen de faire oeuvre.
Dépasser les règles de l'édition commune conduit à s'emparer de toutes les techniques sans a priori, des plus traditionnelles (gravure sur métal et sur bois, lithographie, sérigraphie...) aux plus novatrices (photogravure, tirage numérique, papier mural...), à jouer avec les limites de l'estampe (gigantisme, support autre que le papier, sérialité, collage...), à interroger enfin les modes de représentation comme les systèmes de fabrication des images.
Beaucoup d'acteurs majeurs de l'art de ces cinquante dernières années ont relevé ce défi tout autant intellectuel, visuel, technique qu'économique, parmi lesquels Pierre Alechinsky, Georg Baselitz, Christiane Baumgartner, Pierre Buraglio, Gunter Damisch, Jim Dine, Franz Gertsch, David Hockney, Anselm Kiefer, Frédérique Loutz, Julie Mehretu, Richard Serra, Jose Maria Sicilia, Antoni Tapiès... et bien d'autres.
Un livre d'art sur un artiste d'origine coréenne, venu en France en 1969 pour découvrir les grandes traditions picturales issues de l'Impressionnisme, du Fauvisme de Matisse ou de Derain, et plus encore de l'Abstraction mode Kandinsky, Malevitch, Mondrian, Delaunay, Bissière, Hartung, Debré, Messagier... sans oublier les références peintres américains comme Pollock, Sam Francis, Rothko... voilà déjà qui attire l'attention .
Et ce d'autant plus que l'artiste en question, Kim en Joong, né en 1940 près de Séoul a d'abord reçu des leçons de calligraphies, transmises par son père, dans la tradition bouddhiste. Que ce peintre, devenu catholique en 1967, devenu dominicain à Fribourg en Suisse en 1970, puis prêtre en 1974, ait gardé sa volonté de rester inscrit dans la tradition de la peinture abstraite sans renoncer à son sens de la calligraphie extrême orientale, voilà qui intrigue.
Ce livre veut aider à comprendre ces traditions artistiques et spirituelles, pour entrevoir le processus créateur d'un artiste, Kim en Joong, libre de toute école. Les rencontres de Kim En joong, par delà les générations, avec des peintres comme Picasso et plus encore Matisse ou Cezanne, méritaient des mises en parallèle, voire en concurrence. Des chapitres sont consacrés à ces mises en référence...
La rencontre improbable, mais combien émouvante qui eut lieu entre Kim en Joong (si soucieux d'abstraction picturale et de clarté extrême orientale) et Julien Green (si soucieux de figuration et de romantisme allemand, voire de souvenirs de Savannah en Amérique) intriguait tant qu'elle a mérité une présentation dans un chapitre spécifique.
Le Street art relève-t-il de l'art contemporain ou est-il un phénomène à part ? Difficilement classable depuis son origine, l'art urbain a, en tout état de cause, acquis une place majeure dans l'histoire récente de la création.
Aujourd'hui, ce mouvement artistique entre au musée. Un événement qui pourrait sembler normal pour certains, étonnant, voire choquant pour d'autres, et qui représente surtout une véritable victoire. Hier encore, les interventions dans la rue des taggeurs et graffeurs étaient considérées comme du vandalisme et les relations entre les autorités et les « writers », comparées à celles du chat et de la souris. Désormais, nombreuses sont les villes qui passent commande à ces mêmes artistes pour la réalisation de fresques monumentales. Conquête urbaine témoigne de cette évolution d'un art illicite et contestataire vers une pratique non seulement acceptée mais même sollicitée par les acteurs publics.
Banksy, JonOne, MadC, Shepard Fairey, Speedy Graphito, Alëxone... À travers une soixantaine d'oeuvres de Street art, des créations d'artistes précurseurs des années soixante à aujourd'hui, l'ouvrage retrace les origines et l'évolution de ce mouve- ment et en dévoile les caractéristiques fondamentales.
Le musée des Beaux-Arts d'Angers invite quelques collectionneurs du territoire ligérien à dévoiler une partie de leurs acquisitions et invite ainsi le public à entrer dans leur intimité. Mais au-delà du choix personnel qu'elles révèlent, ces collections particulières éclairent aussi l'histoire du goût, offrent un autre récit de notre époque et de l'histoire de l'art telle qu'elle est habituellement véhi- culée par les institutions.
Ces cinq collections sont extrêmement différentes les unes des autres. La première est celle d'une association fondée autour du mouvement de l'abstraction lyrique, la deuxième est entièrement consacrée au mouvement Art & Language, la troisième est constituée de multiples artistes de différents pays du sud-est asiatique, la quatrième est centrée sur l'art conceptuel, la fi gure de Marcel Duchamp et la jeune création, la cinquième enfi n s'ouvre sur une scène artistique française et internationale, éclectique et multiforme.
Alors, comment se constitue une collection et quels sont ses enjeux ? Que révèle la démarche d'un collectionneur ? La passion silencieuse d'un individu, l'engagement vif porté aux acteurs de l'écosystème artistique dessinent les contours de collections singulières, permettant de mettre à jour ce que signifi e « faire collection » aujourd'hui.
« Sur le motif » : l'expression, popularisée par les impressionnistes, s'applique généralement à une peinture réalisée en exté- rieur, sans dessin préalable. Sous-entendant les notions de spontanéité, de rapidité d'exécution et de transportabilité du maté- riel (tubes de couleur, petits formats), cette peinture se focalise donc sur le paysage. Paysage rural ou urbain, mais aussi intérieur et extérieur.
Cet ouvrage met en relation les oeuvres peintes, dessinées et gravées de quatre artistes contemporaines travaillant sur le motif : Delphine D. Garcia, Chiara Gaggiotti, Virginie Isbell et Corinne Pauvert. On y percevra leurs préoccupations communes et leurs goûts particuliers, des façades des maisons anglo-normandes, chères à Delphine D. Garcia, aux multiples façettes de la cour intérieur de l'immeuble parisien de Chiara Gaggiotti, en passant par les paysages montagneux de Corinne Pauvert et les contemplations ensoleillées de Virginie Isbell.
Ce catalogue se compose ainsi de cinq livrets réunis dans un élégant coffret, un par artiste et le cinquième contenant un essai de l'historien de l'art Brice Ameille, spécialiste du paysage.
ORLAN a toujours fait oeuvre de son corps et incarné dans sa chair toutes les complexités identitaires. Opérée, scannée, remo- délisée en 3D, virtualisée, hybridée, clonée..., son corps interroge et fait débat. Pour chacune de ses oeuvres et performances, elle convoque nouvelles technologies - qu'elles soient scientifi ques, médicales ou biologiques -, algorithmes et autres data.
À l'occasion de l'exposition Artistes & Robots, qui se tiendra du 5 avril au 9 juillet 2018 au Grand Palais, elle pousse le proces- sus très loin en créant, avec une société de robotique française, un robot à son image : l'ORLANOÏDE. Si l'artiste a déjà conçu plusieurs sculptures lui ressemblant, en marbre, en 3D Printing ou en résine, cette oeuvre, dotée d'intelligence artifi cielle et collective, est animée et dialogue avec deux visages de l'artiste vidéoprojetés sur un grand écran. Les questions échangées sont celles imaginées par diverses personnalités du monde culturel et scientifi que qui ont accepté de participer au projet.
Cet humanoïde nous dit combien « je est un autre », combien notre identité est faite par l'autre, combien nous sommes « autre », comme étrangers à nous-mêmes. Il questionne aussi les enjeux génétiques et technologiques de notre société.
L'ouvrage est une invitation à suivre les étapes de la construction du robot, à entrer dans les coulisses de la création, du mou- lage, en passant par le tirage en plastiline, à l'IA, et à en comprendre le sens. Pour cela, l'oeuvre est aussi placée dans la conti- nuité du travail de l'artiste ; si elle en constitue le développement logique, elle représente véritablement l'apogée de la démarche artistique d'ORLAN.
Le processus pictural de Dan Barichasse est singulier. L'artiste dépose sur ses support, le plus souvent des papiers glacés, une succession de matières qui se répandent, s'étalent, se rencontrent pour aboutir à un hasard qui s'impose. Un langage pictural proche de la poésie prend alors forme. En sèchant, les toiles laissent affl eurer fi gures et évocations du minéral, du végétal, de l'animal et de l'humain. Ce travail questionne les processus de mutation de la matière qui, de recomposition en décomposition, se réduit à l'état de poussière et qui, régressant jusqu'à la genèse primordiale des formes, s'épure en spiritualité. Une extrême fl uidité caractérise les oeuvres de Dan Barichasse, dans lesquelles l'éphémère, l'ombre, la poussière et le feu font pacte avec l'inépuisable et vigoureuse insistance des formes.
« VARIA », autrement dit, « varié », « divers ».
Varia , parce que les oeuvres présentées le sont, bien sûr, mais aussi parce que l'exposition elle-même incarne un pas de côté dans un univers artistique différent de celui habituellement montré par la galerie Laurent Strouk : Pop art, Figuration narrative, Figuration libre et Nouveau réalisme.
Avec des oeuvres de Davide Balula, Brian Calvin, Radu Cioca, David Malek, Mathieu Mercier, Olivier Mosset, Kaz Oshiro, Virginia Overton, Bruno Peinado, Adam Pendleton, Gérald Petit, Sylvain Rousseau, Chris Succo, Vincent Szarek, Blair Thurman, Morgane Tschiember, Ida Tursic & Wilfried Mille, Sebastian Wickeroth et Peter Zimmermann.
76 pages dans lesquelles la fi guration côtoie l'abstraction, la couleur répond aux monochromes, la peinture s'invite auprès de la sculpture, la poésie dialogue avec la géométrie... 76 pages qui dressent un panorama de la scène artistique, française et internationale, contemporaine, dans toute sa richesse et sa diversité.
L'atelier est une école ; l'école est un atelier où tout devient possible. Un territoire de liberté d'expression exigeant, un terrain de jeux fécond, propice au déploiement des forces créatrices de centaines d'étudiants, un chaudron fabuleux, un réservoir inouï de vitalité artistique.
Plus de six cents élèves intégrent chaque année l'Atelier de Sèvres pour y suivre une année de préparation aux concours des grandes écoles d'art françaises et internationales. Vierges de tout savoir technique pour beaucoup d'entre eux et peu expéri- mentés en termes de connaissances et de pratiques artistiques, ils sont guidés tout au long du cursus par des enseignants- artistes et des intervenants et sont soutenus par des moyens techniques de haut niveau. Des milliers de réalisations voient alors le jour : dessins, peintures, installations, gravures, photographies, illustrations, sérigraphies, vidéos, céramiques, anima- tions, performances, éditions...
Pour en garder une trace et les mettres en perspective, chaque année, les équipes de l'Atelier de Sèvres réalisent un Panorama des travaux réalisés par chacun des étudiants au cours de sa formation et, ce, quel que soit son cursus, art ou ani- mation. Un Panorama des talents artistiques en devenir, qui émergeront demain sur la scène contemporaine ou dans les mé- tiers des arts décoratifs... À mettre entre les mains des dénicheurs de talents et de tous ceux qui veulent rester en prise directe avec les réalités artistiques d'aujourd'hui.
L'atelier est une école ; l'école est un atelier où tout devient possible. Un territoire de liberté d'expression exigeant, un terrain de jeux fécond, propice au déploiement des forces créatrices de centaines d'étudiants, un chaudron fabuleux, un réservoir inouï de vitalité artistique.
Plus de six cents élèves intégrent chaque année l'Atelier de Sèvres pour y suivre une année de préparation aux concours des grandes écoles d'art françaises et internationales. Vierges de tout savoir technique pour beaucoup d'entre eux et peu expéri- mentés en termes de connaissances et de pratiques artistiques, ils sont guidés tout au long du cursus par des enseignants- artistes et des intervenants et sont soutenus par des moyens techniques de haut niveau. Des milliers de réalisations voient alors le jour : dessins, peintures, installations, gravures, photographies, illustrations, sérigraphies, vidéos, céramiques, anima- tions, performances, éditions...
Pour en garder une trace et les mettres en perspective, chaque année, les équipes de l'Atelier de Sèvres réalisent un Panorama des travaux réalisés par chacun des étudiants au cours de sa formation et, ce, quel que soit son cursus, art ou ani- mation. Un Panorama des talents artistiques en devenir, qui émergeront demain sur la scène contemporaine ou dans les mé- tiers des arts décoratifs... À mettre entre les mains des dénicheurs de talents et de tous ceux qui veulent rester en prise directe avec les réalités artistiques d'aujourd'hui.
Isabel Duperray (née en 1966) travaille sur le paysage et l'inscription du corps dans celui-ci - de la nature sauvage aux baigneuses, du mythe à l'hédonisme contemporain. Elle reprend ainsi le fi l ininterrompu entre les artistes du passé et du présent qui s'inté- ressent aux liens entre notre regard sur le paysage et le rôle de la mémoire, des lieux, des oeuvres et des mots qui nous habitent quand nous parcourons un territoire, qu'il nous soit familier, intime ou étranger.
Sa peinture s'appuie ainsi sur la résurgence d'images intimes dont la récurrence apparaît au fi l des années : paysage originel de l'enfance entrant en résonance avec un fond qui nous est commun, issu de l'histoire de l'art.
Cet ouvrage est donc un dialogue entre des oeuvres - peintures, gravures et monotypes -, un auteur, Anthony Poiraudeau, et un historien de l'art, Jean-François Chevrier ; dialogue initié au sein d'une résidence croisée sur le thème du paysage, à la Maison Julien Gracq de Saint-Florent-le-Vieil en juin 2017. Une aventure autant humaine qu'artistique.
Le 8 avril 1791, Chateaubriand, alors âgé de 22 ans, s'embarque pour l'Amérique, à la recherche d'images authentiques et du fameux « passage du Nord-Ouest » qu'on croyait permettre la liaison de la mer du Groenland au Pacifi que. Tout juste débarqué à Baltimore, il gagne la région des Grands Lacs, à la rencontre des nations indiennes. Chateaubriand bivouaque non loin des chutes du Niagara. Face à la nature « sauvage et sublime », éclairée par la pleine lune, il s'abandonne à la rêverie que suscite en lui la nuit américaine : une expérience de l'extase. La première relation de cette nuit, publiée dans l' Essai sur les révolutions en 1797, Chateaubriand va au cours de sa vie la réécrire six fois.
L'artiste Sophie Kitching prend appui sur ces réélaborations successives du souvenir de cette Nuit, par additions et superposi- tions, ainsi que sur son effacement progressif, pour concevoir trois séries d'oeuvres plastiques. À travers une diversité de tech- niques (installation, performance, peinture, photographie, vidéo), l'artiste privilégie les approches sensibles et immersives destinées à évoquer l'expérience telle qu'a pu la vivre l'auteur du Voyage en Amérique et l'infl uence de la nature dans ses oeuvres.
Au croisement entre art et artisanat, les oeuvres en céramique ou en bronze de l'artiste britannique Grayson Perry et ses grandes tapisseries sont autant de commentaires ironiques et grinçants sur des questions universelles, telles que l'identité, le genre, la classe, la religion et la sexualité. Parfois sous l'aspect de son alter ego féminin Claire, Grayson Perry explore les goûts, les tradi- tions, les rituels d'aujourd'hui avec une approche d'anthropologue, à la fois profonde et amusante.
Artiste lauréat du Turner Prize en 2003, Perry se fait connaître avec son oeuvre en céramique commencée dans les années 1980, alors que ce matériau était très peu considéré par le monde de l'art contemporain. Les formes de ses vases, souvent inspirés par la tradition vernaculaire anglaise, sont associées à un contenu subversif : une imagerie explicitement sexuelle, des icones punk et pop, des couleurs vives. Perry est depuis toujours fasciné par tout ce qui est anti-institutionnel et considéré comme « outsider ».
Sa pratique du travestissement est aussi un choix à contre-courant qui lui permet de porter un regard privilégié sur les probléma- tiques liées aux questions de genre et d'identité. Dans plusieurs oeuvres, l'artiste questionne l'idéal masculin et en montre d'ailleurs son érosion.
Plus récemment Perry a commencé à travailler la tapisserie : à la place des grandes scènes mythologiques ou des batailles his- toriques il tisse les excentricités et les particularités de la vie britannique moderne. Il utilise cette ancienne forme d'art allégorique pour raconter les divisions et les différences de classes, si présentes aujourd'hui encore au sein de la société anglaise.
Avec la Révolution industrielle, la mobilité a connu un bouleversement sans précédent en Occident. La constitution du réseau ferré au XIX e siècle a permis de relier facilement des territoires autrefois éloignés, grâce à une vitesse de déplacement bien plus importante que celle de la marche, du bateau ou du cheval. Au XX e siècle, le développement du système automobile a intensifi é ces transformations en apportant la souplesse des horaires et les trajets en porte-à-porte. Enfi n, l'avion a permis de rejoindre en quelques heures seulement n'importe quel point du globe.
L'organisation des territoires a été remodelée sous l'infl uence des possibilités offertes par ces nouveaux modes de transport.
Nos modes de vie en ont été complètement transformés : ils sont beaucoup plus dispersés dans l'espace qu'auparavant.
L'accès à une mobilité rapide a été vécu comme une liberté extraordinaire, dont témoignent les écrivains du début du XIX e siècle mais aussi les citadins chinois contemporains, qui ont connu en quarante ans le passage d'une société traditionnelle à une société mobile. Tous les continents sont concernés par ce « tournant de la mobilité ».
Mais, si la mobilité est une formidable source de liberté, elle génère également des problèmes majeurs : pollution, émissions de gaz à effet de serre, étalement urbain, fatigue, congestion... Alors demain, pourrons-nous et voudrons nous encore nous déplacer autant ?
En mars 2017, Jean-Pierre Lemaire est le premier hôte du Printemps des poètes organisé par la ville de Fontainebleau. Dans le même temps, Mathieu Wührmann est invité à présenter ses « Portraits d'arbres » dans la salle des fêtes du théâtre de la ville. Ce rapprochement du poète et du peintre est à l'origine d'un compagnonnage qui se manifeste aujourd'hui dans cet ouvrage.
Peintre et poète ont deux points communs : ils reconnaissent tous deux la forêt de Fontainebleau comme un espace bienfaisant et une source d'inspiration particulière ; et, avant de se connaître, tous deux s'étaient appuyés sur la même pensée de Philippe Jaccottet pour évoquer la ligne directrice qu'ils souhaitent donner à leur travail : « Que l'effacement soit ma façon de resplendir. » On ne sent pas en effet dans leur démarche une volonté d'affirmer, d'imprimer une marque, d'inventer un langage nouveau, mais au plutôt une attitude qui privilégie l'attention, l'écoute, le désir d'entrer dans le mouvement de cette vie qui les attire et - selon leur voix singulière - l'espoir d'en témoigner avec humilité. Car à travers ces poèmes, parfois inédits, ces dessins, ces peintures et ces pages de carnets opère le charme si particulier de la forêt de Fontainebleau ; celui d'une réalité qui dépasse de loin le pitto- resque, la conscience fugitive de percevoir un lieu réel où résident véritablement le silence et la paix.
La sélection d'oeuvres est accompagnée d'un entretien inédit avec Jean-Pierre Lemaire ainsi que des regards du peintre Alexandre Hollan, du critique d'art Alain Madeleine-Perdrillat et de Jacques Madelain, agrégé de Lettres et initiateur du projet.
Patrick Neu travaille le cristal, la mie de pain, le plomb, la coquille d'oeuf ou la cire d'abeille, dessine à l'encre de Chine sur des ailes de papillon, peint à la gouache sur des papiers carbonisés, grave des verres en cristal à la pointe de la plume dans le noir de fumée. Autant d'exercices de « funambulisme sculptural » mêlant modestie et maîtrise technique, patience et minutie. Ce sont des heures, des mois, des années qu'il encapsule ainsi dans ses oeuvres, avec lesquelles il entretient une proximité de longue durée. Méthodiquement, méticuleusement, patiemment, il confectionne une camisole de force à partir de milliers d'ailes d'abeilles assemblées avec une précision chirurgicale au vernis à ongles, ou réalise une armure de samouraï en cristal, tisse un voile en cheveux naturels... L'artiste oppose la fragilité des matériaux à la force que représentent les objets pour interroger l'im- permanence et la fragilité de la vie. Bénitiers, chasubles, marionnettes d'ombres de Bali et d'Indonésie revisités... autant de réminiscences délicates de l'histoire de l'art qui offrent une lecture contemporaine de notre culture artistique classique.
Mathieu Cherkit, né en 1982, est résolument un peintre figuratif. Il peint « sur le motif » et aborde l'exercice de la peinture par l'un de ses fondamentaux : la perspective centrale, dont Alberti et Dürer ont établi le procédé à la Renaissance. Le choix de l'emplacement, la désignation du point de vue décident de l'agencement du futur tableau. Ce qui va apparaître sur la toile sera une réduction homothétique de ce que l'artiste, placé à cet endroit précis, retiendra de la réalité. Libéré du souci de la compo- sition, il peut se concentrer sur la manière spécifique et personnelle selon laquelle il va élaborer le tableau. Apparemment par- faitement réalistes, ses toiles obéissent donc à un traitement de l'espace qui ne suit pas la logique du réel. Les règles conventionnelles et le réalisme sont abandonnés au profit d'expérimentations spatiales qui perturbent le regard.
Le territoire de Mathieu Cherkit, c'est le pavillon de banlieue familial dans lequel il vivait jusqu'à présent et qui servait de sujet exclusif à sa peinture. Chacun de ses tableaux ouvre une porte sur une des pièces de cette maison, où la figure humaine est absente ou représentée de façon parcellaire pour mieux laisser la place aux objets qui les peuplent. Ce cadre résidentiel repré- senté de façon récurrente devient familier, mais cette familiarité se révèle rapidement parasitée par l'étrangeté : de singulières distorsions formelles, des portes d'entrée sur des microcosmes mentaux, intimes et oniriques. Une réflexion sur la peinture elle-même.
Les pièces présentées dans ce catalogue, pour la plupart inédites et pensées pour les espaces de Maubuisson, sont un écho à l'histoire et à la matérialité de ce lieu. Maubuisson représente pour l'artiste un territoire de recherche et d'expériences physiques. Il explore des gestuelles précises, adaptées aux lieux, aux matériaux, aux objets, pour en extraire des fragments d'histoires. Dans la salle du Chapitre, ancien lieu d'inhumation, il présente vingt coffrages en bois brut ornés de fl eurs en marqueterie, évoquant les tombes des moniales. Ici, le sol est le lieu des morts : celui où sont enterrés les défunts. Avec Régis Perray, le visiteur a les pieds sur terre : il ne peut ignorer qu'il marche sur des morts quand il déambule en salle du Chapitre. Le sol est aussi une surface à soigner, à patiner, à subli- mer, comme pour ne pas oublier d'où l'on vient, s'ancrer solidement, prendre racine. Il est aussi le lieu de la renaissance : on peut y faire pousser des fl eurs.
L'exposition de Régis Perray est empreinte d'une générosité propre à son auteur. Elle soigne les blessures en déposant une fleur sur la tombe des cisterciennes. Elle réconcilie avec le corps en nous engageant tout entier sur la patinoire. Elle fait entrer dans notre intérieur la couleur, la diversité et la beauté des fleurs. Elle rappelle la douceur des caresses sur la peau. Elle fait renaître la vie sur les ruines et offre une vision poétique pour le futur de l'abbaye en proposant la construction d'une chapelle. Chaque oeuvre est un don : Régis Perray partage avec le visiteur, ici une fleur, ici un tour de patinoire, ici une pensée pour les morts, ici une caresse. Quand l'art rencontre le coeur, c'est là toute la force de l'oeuvre de Régis Perray.
Les périodes d'intenses bouleversements technologiques sont propices aux histoires de fantômes, dont les spectres ont toujours hanté les machines. Celles de notre siècle paraissent étrangement vivantes dans leur autonomie grandissante. L'intrusion des technologies dans nos vies a d'abord enfl ammé nos imaginations, en étendant notre perception à l'invisible ou nous permettant de communiquer avec les esprits occultes. Les machines et les médias numériques ont colonisé notre quotidien, nous cohabitons maintenant avec ces agents sans parfois nous apercevoir de leur présence, qui tend à s'effacer de notre champ de vision. Par les capacités nouvelles dont elles nous dotent, les hori- zons qu'elles ouvrent, ces technologies nous transforment profondément. Nous nous dématérialisons en un fl ux constant et grandissant de données et d'informations, nous sortons de nos corps et nous éparpillons sur les réseaux.
Serions-nous en train de devenir nous-mêmes des présences incertaines et fantômatiques ? Des artistes contemporains s'emparent des médias à leur disposition pour brouiller encore les frontières, entre ce qui est humain et ce qui ne l'est pas, entre l'invisible et le tangible, le virtuel et le réel. Ils jouent, détournent ou critiquent les technologies numériques pour questionner la manière dont elles nous métamor- phosent et modèlent nos imaginaires.
En s'appuyant sur les contenus de l'exposition produite par la Gaîté lyrique, cet ouvrage collectif et polyphonique propose un panorama subjectif des technologies du temps présent mises en récit par des artistes et des chercheurs.
De son propre aveu, Zhu Hong (née en 1975, à Shanghai) aime visiter les musées. Tout l'y inspire : les collections, l'architecture, la scénographie, les éléments du décor, jusque dans les refl ets de la lumière sur les verres des dessins ou les vernis brillants des peintures, jusque dans les traces d'humidité et les déchirures laissées par le passage du temps et les aléas de l'histoire.
Son travail de peintre et de dessinatrice s'y nourrit et elle y révèle par des évocations, des fragments, ce qui avait échappé à l'oeil du visiteur - et du conservateur.
À l'invitation du musée de La Roche-sur-Yon, Zhu Hong est venue s'immerger dans les collections de dessins, estampes et photographies, passant d'un siècle à l'autre. Les traits de burin des gravures se changent en ciels infi nis de crayon graphite ; les allégories, les muses et les belles demoiselles des siècles passés s'effacent et se fragmentent sous ses pinceaux, et les photographies se diluent dans les tâches d'eau ou retournent à la lumière. La poésie et le mystère qui parcourent son oeuvre entraîne le spectateur dans un voyage sensible à la recherche du génie des arts qui sommeille dans les collections du musée.